Pour une mauvaise répondeuse, quoi de neuf docteur ?

D’abord, c’est qui la « mauvaise répondeuse » ?
Et oui n’est pas « mauvaise répondeuse » qui veut… Il faut un certain talent, remplir des critères précis… C’est pas facile d’être une « mauvaise répondeuse » !
Alors à Bologne ils se sont rassemblés, autour d’une table ils ont discuté, rapidement le ton est monté et puis finalement la fumée blanche s’est échappée (enfin ça c’était à Rome…) : Sur des critères ils s’étaient accordés (plus ou moins) !
Pour rentrer dans la grande case de la « mauvaise répondeuse », il faut cocher des petites cases. Une mauvaise répondeuse doit remplir au minimum 2 cases (ou 2 fois la même case) :
- Un âge supérieur à 40 ans
- Moins de 3 ovocytes recueillis sur une stim précédente (case cochable 2 fois si il y a eu récurrence)
- Un CFA inférieur à 5 (ou à 7, la dessus ils ne se sont pas mis d’accords)
- Une AMH inférieure à 0,5 ng/ml (ou à 1,1 pas d’accords non plus, mais le 0,5 semble l’emporter)
Ces critères de Bologne ne s’attachent donc qu’à la quantité… Aucun égard pour la qualité… Mais bon ils ont le mérite d’exister.
Vous rentrez dans la petite case ? Alors c’est parti, vous pouvez lire la suite !
Et une fois qu’on a le diplôme de « mauvaise répondeuse », on gagne quoi ?
Et bien on gagne le privilège d’avoir de gentils chercheurs qui nous cherchent des solutions ! Et la bonne nouvelle c’est qu’ils fourmillent d’idées… Je vous dévoile quelques secrets ? Aller, suivez-moi… Mais chuuutt … On attend la fin des études pour se réjouir quand même !
Idée #1 : Utiliser AVANT l’ovulation des hormones sécrétées normalement APRES l’ovulation
Dit autrement, pendant la phase lutéale on sécrète de la progestérone (voir le petit schéma de l’article sur l’ovulation pour un refresh si besoin). Et bien en plus de la stimulation, une étude tend à montrer qu’en ajoutant de la médroxyprogestérone (à vos souhaits), c’est-à-dire un progestatif, les mauvaises répondeuses semblaient recueillir plus d’ovocytes (Congrès ESHRE2016). L’avantage, c’est que cette progestérone empêche l’ovulation de se déclencher, comme le ferait un antagoniste (Orgalutran®, Cétrotide®) ce qui pourrait conduire (pardon aux laboratoires concernés) à se passer de cette méthode de blocage de l’ovulation que l’on appelle antagoniste de la GnRH.
Et ce n’est pas tout !!! Grâce aux mauvaises répondeuses, les chercheurs ont pu étendre l’étude aux femmes OPK qui semblent, quant à elles obtenir un nombre d’ovocytes identique avec ou sans la progestérone, mais un nombre d’embryons supérieur.
Entre femmes infertiles pas de guerres de clochers : on se soutient !!!
Idée #2 Mettre la phase lutéale à l’honneur !
C’est à Shanghai, ce coup-ci que les princes de l’infertilité se sont réunis pour développer une idée tout aussi ingénieuse : aller un peu plus loin dans les trésors encore inexploités de la phase lutéale (vous pouvez retourner sur l’article concernant l’ovulation pour le schéma du cycle). Intitulée Duostim, cette technique encore à l’étude consiste en :
- Une stimulation ovarienne comme on les aime (ou pas)
- Une ponction de ces follicules arrivés à maturité
- Une seconde stimulation qui commence le soir même de la ponction (oui oui, quelle créativité !)
- Une seconde ponction
Et pourquoi donc s’acharner sur le même cycle ? Et bien pour deux bonnes raisons :
- D’abord la première stimulation semble sensibiliser les ovaires pour la seconde stim **
- Ensuite parce qu’étant en phase lutéale on s’affranchit de la nécessité de bloquer l’ovulation (Amis Cetrotide®, Orgalutran®… Pardon !)
Et les résultats ? Et bien sur 40 patientes (oui ce n’est pas beaucoup, donc on ne s’emballe pas encore) répondant aux critères de Bologne, nous obtenons 30% de grossesse par FIV… Et aucune FC n’a été déplorée. À suivre donc.
** Petit aparté relatif à l’astérisque ci-dessus : De la même manière, lorsque nous sommes anéanties par l’échec d’une stim, il semble malgré tout opportun de ne pas baisser les bras tout de suite : le cycle qui suit une stimulation peut être particulièrement propice à ce que certaines appelleront « un miracle » : C’est aussi à cause de la sensibilisation de l’ovaire consécutive à la stim du mois précédent (pas uniquement, mais ce n’est pas l’objet de ce présent article, donc retenez juste que si vos trompes vous le permettent… GO!)
Idée #3 La FSH retard
Vous allez me dire OK Elonva® on connaît… Oui mais au regard du temps qu’il faut pour développer une nouvelle technique, ça n’est pas si vieux… Et la nouvelle génération de FSH retard va par ailleurs sortir prochainement alors réjouissons-nous !
La FSH retard, c’est une stimulation qui consiste en une seule injection à J3 (exit les sorties avec le petit sac de congélation pour se piquer dans la salle de bains des copines en plein milieu de l’apéro afin de respecter l’heure fixe de l’injection… !!!). Une seule injection en début de cycle, qui stimule pendant plusieurs jours. Cette stim super pratique est ensuite souvent renforcée par une seconde salve de stimulation plus classique puisque quotidienne (on y revient) mais juste quelques jours (3 à 4 à partir de J8 généralement).
Une toute petite étude effectuée sur un groupe de patiente répondant aux critères de Bologne laisse penser que ce protocole permettrait un taux de grossesses porté à 35% … Mais bon… À voire à plus grande échelle. En tout cas si c’est vrai cette approche présente l’avantage de diminuer la quantité de produit que nous nous injectons.
Idée #4 Le rajeunissement ovarien
Des études sont actuellement en cours sur des techniques que je ne détaillerais pas ici au risque de perdre toutes mes lectrices… Il s’agit néanmoins de plusieurs techniques tant fascinantes qu’ingénieuses visant à obtenir des ovocytes fécondables chez des femmes en insuffisance ovarienne prématurée. Méfiez-vous néanmoins, certaines cliniques s’avancent un peu en promettant déjà monts et merveilles. Ces techniques sont aujourd’hui uniquement au stade d’étude.
Cela n’engage que moi, mais je suis convaincue qu’il s’agit d’une piste pouvant révolutionner la Procréation Médicament Assistée au même titre que le Don d’Utérus est en train de changer la donne chez les femmes souffrant d’utérus didelphe, bicorne cloisonné voir sans utérus. Pour autant je reste perplexe devant les cliniques étrangères qui proposent d’ors et déjà d’appliquer ces techniques encore à l’étude. La plupart des mauvaises répondeuses se battent contre le temps et il est alors extrêmement difficile de résister aux chants des sirènes… Mais s’il vous plaît… Restez vigilantes quant aux promesses empiriques.
Bien sûr on aimerait que ça aille plus vite… Mais je veux me réjouir de ces belles perspectives qui, je l’espère, feront leurs preuves et leur chemin le plus rapidement possible !